SIMON HAUSTAN
Tonton Simon, de son vrai nom Sébastien Simon Haustan, est mort dimanche 31 mai 1998 à 19h45 à l’hôpital de la Meynard à l’âge de 76 ans.
Ton Simon, de la commune des Trois-Ilets, était un « Met tanbou », un Met chantè », et un grand combattant du danmyé. On peut dire qu’il était un des meilleurs représentants du danmyé et plus particulièrement de celui du sud. Comme son maître, Andréa, il était encore un des rares à chanter tout en battant le tambour. Sa voix et sa musique étaient en fusion totale avec l’art danmyé et remuait en vous tout ce que vous aviez de guerrier et aussi toute cette mémoire de la souffrance et de la combativité du peuple noir de Martinique.
Ouvert, d’une grande sociabilité, conscient de l’intérêt du danmyé pour notre communauté, il soutenait son mouvement actuel de réorganisation et contribuait à la formation de nombreux jeunes danmyétè (tanbouyé, bwatè, chanteurs, combattants).
Il a animé toute sa vie durant les rendez-vous de danmyé. Il a été co-créateur de la biguine lélé avec Francisco et a enregistré d’ailleurs avec lui le fameux disque « Biguine lélé » en 1966, où on trouve des morceaux célèbres comme « Ba mwen lajan mwen Bango », « Filé Obè-o »… Il participait ainsi à la toute première expérience d’ouverture de la musique danmyé à d’autres instruments. Il a enregistré également en 19839 un disque avec l’AM4 sur le danmyé et le bèlè du sud aux côtés d’autres grandes figures des traditions du sud (Lucien Lameytrie, Silormon Priam, Espélizane Sainte-Rose…).
Le nom de Simon Haustan n’est pas seulement attaché au danmyé. Il a été un des représentants émérites du bèlè de la région sud de la Martinique (et notamment de sa version îléenne). Ayant vécu et travaillé durant seize ans à Sainte-Marie, il avait aussi un bonne connaissance de la forme samaritaine du bèlè. Il a participé également, aux côtés de Loulou Boislaville, à l’animation du Groupe Folklorique Martiniquais. Ton Simon était un excellent joueur de chacha. Et il a animé longtemps le carnaval foyalais avec la danse « Négriyé » (mabélo lakoup kann). L’émission radiophonique « Punch en musique » et le Sélect tango ont accueilli ses talents aux côtés de grandes figures comme Hurrard Coppet, Trébeau…
Simon Haustan était donc un musicien complet, excellent au danmyé, mais aussi très à l’aise dans plusieurs instruments et dans tous les rythmes martiniquais et afro-caribéens.
L’homme lui-même, nous l’avons dit, était ouvert, très sociable, d’une grande force de vie. Comme tout le monde, il avait ses colères et ses défauts, mais il allait toujours à l’essentiel. Il avait surtout compris « qu’il est bien plus important d’être quelqu’un de bien même si c’est bien d’être quelqu’un d’important ». Homme de la mer, marin-pêcheur, il était un gros travailleur qui a pratiqué beaucoup de métiers. Tonton Simon, l’homme au bakoua, avait rejoint la maison de retraite du Lamentin depuis janvier 1996. Et là, il contribuait à tresser ses bakouas, à dispenser son savoir, à faire rayonner sa grande joie, sa bonté et sa force de vie.
Il nous manquera.
Il reste à tous ceux qu’il a contribué à former à redoubler d’efforts afin de prolonger son action et rendre encore plus vivant ce qu’il a animé toute sa vie durant.
Dominique CYRILLE, ethnomusicologue
Camille CELENISTE, diplômé de Berklee College Music
Christian CHARLES-DENIS, « Kiki Francisco », percussionniste
Le Comité directeur de l’AM4
Le Komité lézalyé LAVONN BELE