Bilan des swaré bèlè de la saison 2010 2011

(Réunion de Coordination Lawonn bèlè du 23 octobre 2011 - Pit Casérus)

 

 

Présents : Félix CASERUS - Berté GRIVALLIERS - Marie-Victoire PERSANI - Benoit et Paul RASTOCLE - AM4 - ASCLR - BELE DES MORNES - BELENOU - BELYA - FLEUR CREOLE - KABELL - KANNIGWE - LAO - LANBELI - INFOS BELE - Section bèlè de l’association LA CIGOGNE

 

   Cette année confirme ce qu’on constate depuis plusieurs années : le mouvement bèlè est ascendant. Il touche des fractions de plus en plus larges de notre peuple (cf fréquentation des swaré) et le nombre des pratiquants augmente. Grâce à la bonne volonté d’un très grand nombre, à la mise en œuvre de Larel swaré bèlè, à l’action de la Coordination, des associations, organisateurs et animateurs, les swaré connaissent de notables améliorations. Cependant de nouveaux problèmes apparaissent, liés à la croissance du mouvement bèlè, auxquels il faut apporter des réponses. L’accent doit être porté aujourd’hui sur la qualité et le sens.

Ainsi, dans le but de renforcer la qualité des swaré, certaines remarques sont nécessaires.

 

Concernant les tenues 

Il est bon que les animateurs rappellent des principes de la tradition codifiés dans «  Larel swaré bèlè ».

* I ni an pawol pou sé danm-lan aprésié : “Bèlè sé twel ... Pli ou ni twel, pli i bon”. Kilédi ou ni an wob oubien an jip ki an gou'w mé i ni an lajè épi an londjè, ek anba'y ou ni jipon'w. (…)

Quelques danseuses (assez rares) n'ont pas encore compris l'importance du jupon, à la fois pour le respect des pratiquants et assistants et aussi pour l’esthétique (que penser du port de cyclistes, de panty, etc … ?). D’autres, par contre, portent des jupons ou trop courts ou trop larges (pas assez droits), ce qui les découvre largement lors de leurs mouvements (notamment dans les « tounen »).

 

*"(…) "Bèlè sé twel" kilédi wo-a tou, fok ou katjilé londjè'y, dékolté'y, manch-li oubien lajè britel-li : fok pa sa mété respé'w épi ta ou dwé moun an danjé.(…)"

Il faudrait donc que certaines danseuses portent une plus grande attention au haut de leur tenue en évitant le port de bustier ou encore les fines bretelles et décolletés profonds qui dégagent leur poitrine à la limite du "regardable" et qui leur impose d'utiliser sans cesse les bras pour "remonter" le vêtement.

 

*"(…) Mouchwè-a sé an sin, tout danm bèlè ka maré ren-yo épi'y".

Aussi n’est-il pas normal que quelques danseuses (en très petit nombre fort heureusement) se dispensent systématiquement de porter le "mouchwè" lors des swaré.

 

* « (…) Sé nonm-lan tou, foda yo aprèsié an pawol : "bèlè sé bel dikanman". Kilédi rad-ou pa déchiré, i pa dédou, i pwop, pantalon-a ni an londjè épi an lajè, wo-a réfléchi. Épi, an ti diez, an ti ganm : i bon tou. »

 

Concernant les rotations entre les pratiquants 

"(…) tout moun pé apwann. Mé i ni apranti épi apranti : fok pa ou ka kasé jé-a ! Adan swaré bèlè, dépi antan swaré bèlè parèt, jé-a pou ni an nivo … Kidonk avan ou plasé kò'w adan an swaré, fok ou fè an bon aprantisaj ; sé dansè épi mizisien ki ja abituié ki ka plasé kò-yo ; lè ou pòkò abituié, i préférab yo plasé'w, oubien "ni an lè pou antré" (…)" (Extrait de Larel swaré bèlè)

   *Lorsqu’il n’y a pas un nombre important de pratiquants, les roulements se font de la propre initiative des pratiquants et il y a autorégulation sans qu’il y ait besoin de l’intervention d’un animateur.

Dans une swaré où il y a un grand nombre de pratiquants, l’expérience, codifiée par Larel swaré bèlè, a montré la nécessité d’un animateur qui, tout en préservant autant que possible l’initiative des participants, a toute autorité pour faciliter la régulation nécessaire. Pour ce faire, il tient compte de plusieurs éléments : 

-Organiser l’énergie du bèlè, l’ambiance et la dynamique de la swaré (« fok tjenbé kouwan bèlè-a, fok pa kité’y tonbé ») et donc faire, nécessairement, certains choix d’intervenants à des moments stratégiques.

-Faire vivre le principe de « Lonè-respé » envers les Gran ansien (qui ont une priorité dans le roulement et dans le nombre de morceaux), et envers Ansien et Djoubatè (qui ont une priorité dans le roulement).

-Essayer de faire en sorte que tout le monde puisse participer (en sachant que la swaré se déroule de 8h à 3-4h du matin et que tout le monde ne peut pas « fidjiré » à la même heure ou à l’heure qu’il souhaite). 

-Prendre en considération, autant que possible, l’ordre d’arrivée des pratiquants.

 

   *Il faut maîtriser deux tendances :

- L’une qui, au nom de l’égalité, impose en fait une sorte d’égalitarisme qui nie les différences d’expérience et de talent, et qui encourage certains à se poser en rivalité et en compétition avec des gran ansien, des ansien et djoubatè ou encore des abitjuié. Cette tendance malmène le principe du lonè-respé et aussi la nécessité de construire l’énergie de la swaré. Elle ne prend en compte, pour les rotations, que l’ordre d’arrivée, ou encore l’arrangement que passent, en toute discrétion, les pratiquants entre eux. Il faut inviter tous ceux qui « arrivent » dans le bèlè à apprécier, avec humilité, leur véritable niveau, et à apprendre à attendre. « Atansion ! ou ka démaré, ou pé pa enpozé kò’w » … « Moun-lan lé alé vit é i pa pli konnet bagay-la » … « Fok fè sé asistan-an plézi ». Il y a des heures plus favorables pour ceux qui « s’essayent » : en début de swaré (si Ansien, djoubatè et abitjuié ne sont pas encore là) ou en fin de swaré (aux environs de 0h30-1h).

-A l’inverse, l’autre tendance, au nom de la liberté et de la spontanéité, ne voudrait prendre en compte que l’arrangement que passent les pratiquants entre eux (le plus souvent, des abitjuié). Mais on voit bien qu’ainsi, c’est souvent le copinage qui s’installe, sans le souci d’organiser la participation du plus grand nombre possible, sans celui de l’ordre d’arrivée, et aussi au détriment du lonè-respé.

 

   *Si ces problèmes se posent entre danseurs, chanteurs et tanbouyé, on assiste à toute autre chose pour les tibwa. Il y a quelques pratiquants qui se consacrent au tibwa : ils ne sont pas nombreux. Il y a comme une sorte de « pwofitasion » envers eux. Nombre de tanbouyé pourtant peuvent jouer au tibwa et participer ainsi aux rotations. Certains donnent l’impression qu’en faisant cela, ils subiraient un « déclassement ».

 

Concernant la sonorisation / « Bèlè sé mizik » 

Il y a encore, chez certains organisateurs, une sous-estimation de cette question : on a parfois une sonorisation trop forte, avec des effets larsen incessants et des sons mal équilibrés entre les différents instruments. Il faut un confort d’écoute, un son agréable … sinon nombre de personnes habituées à des sons de qualité en concluent que « bèlè se djendjen ». Il faut penser aussi à adapter le niveau de la sonorisation aux différents moments de la swaré : en fin de swaré, avec le départ d’une partie des « asistan », les sons ne sont plus autant absorbés par les corps ; il faudrait donc baisser le niveau, à la fois pour le confort d’écoute et pour la bonne entente avec le voisinage.

 

Concernant la danse elle-même

Quelques « pawol » d’Anciens et de djoubatè résument assez bien les problèmes soulevés.

« Sé moun-lan pa ka dansé asé … I fo ou eksprimé kò’w avan ou monté o tanbou » - « Foda moun-lan pran tan pou dansé » - « Epi fok sé manmay-la apwann dansé pozé … kontel ni an zafè solivo ki lé antré lanmod : i pa adan … Sa vré, lajénès ké ni pou ajouté ta’y, mé sa pa ka fet nenpot ki manniè » - « Epi i ni la regle du jeu : ni adan ki pa konnet-li ». - « I ni dansé-a épi i ni jé-a, foda ou dansé avan ou fè jé-a é adan jé-a. C’est un art : il y a un rapport entre maîtrise technique et expression, sinon ça tourne au théâtre ou à l’extravagance. On a l’impression que certaines monté o tanbou privilégient l’extravagance » - « Il faut que les associations fassent le travail : bèlè sé pa espò, é sé pa résité pa ».

 

Concernant les salles

En dehors des « temples » bien connus, elles ne sont pas toujours adaptées. On fait avec ce qu’on a. Aux organisateurs d’arranger les lieux afin qu’ils servent au mieux l’énergie bèlè.

Il faut souligner à nouveau les difficultés de plus en plus grandes pour obtenir des salles (pour les swaré et entraînements). Il faut une réaction officielle de la Coordination : prendre contact avec les décideurs pour discuter de cette question et trouver des accords.

 

            Ainsi donc, les choses progressent, mais doivent être encore améliorées. « Bèlè sé lod » : il s’agit, aujourd’hui, de renforcer la mise en œuvre de Larel swaré bèlè et l’action de l’animateur de swaré.