Emmanuel CASERUS dit TI EMILE
Ti Émile est né en 1925 au Quartier Bezaudin à Sainte-Marie et est décédé en mars 1992. Il est le fils de Victoire CASERUS (qui épousera Saint-Ange PERSANI) et l’ainé d’une famille de huit enfants. Il abandonne l’école dès l’âge de 13 ans afin d’aider ses parents et devient ouvrier agricole. A partir du début des années 1970, il est employé comme agent culturel et surveillant au Centre culturel Jean-Marie Serreau (ex Pit Dillon) par la municipalité de Fort-de-France. Il prend sa retraite en 1989.
Ayant vécu à Sainte-Marie jusqu’en 1970, il a contribué à préserver le bèlè déjà dans la région samaritaine elle même. En 1937, il chante en public pour la première fois à Saint Pierre, sur la place du marché : il est ovationné. Il continue à apprendre aux côtés des grands maîtres de l’époque : Stéphane SEBAREC dit BLANCHARD, Clémence BONIFACE, Jean ANNETTE, Féfé MAROLANY, GALFETE … Il crée sa « kay bèlè » et anime les « won bèlè » de la région. En 1961, il participe à la création et à l’animation du groupe légendaire « Lévé yo ka » qui se produit un peu partout.
Des traces de cette époque sont gravées sur les disques : Chant de Bel Air (Production de l'AGEM) - Folklore de campagne recueilli par Anca Bertrand - Ti Émile nouveaux cantiques de Noël - ainsi que sur les enregistrements recueillis par Franck HUBERT en 1961.
Ti Emile a aussi largement contribué à propager la forme samaritaine du bèlè à Fort-de-France, sa seconde commune, et dans toute la Martinique (…) Il crée l’association « La fleur créole » dès 1970 qui va contribuer à la formation de beaucoup de jeunes danseurs et à la diffusion du bèlè. Il est celui qui, dans une large mesure, a initié nombre de militants pionniers du mouvement de renouveau du danmyé-kalennda-bèlè dans les domaines de la danse et du chant, et aussi du tambour/tibwa (par les conseils prodigués et les contacts favorisés) ; celui qui encourageait, par les contacts individuels, par la transmission de son savoir, par sa présence aux manifestations, par des invitations, la démarche de renouveau ; celui aussi qui se démarquait, respectueusement, voire discrètement, lorsqu'il n'était pas d'accord.
Ti Emile est celui qui, animé de l'esprit de tolérance et de partage, allait soutenir les swaré bèlè organisés par les "moun bèlè" du sud, pourtant pratiquants d'une autre forme de bèlè. Il est celui qui prenant l'initiative d'organiser des tournois danmyé, invitait les danmyétè de toute la Martinique, ceux du nord et du sud. Il est aussi celui, qui, animé de l'esprit de solidarité, était de presque toutes les swaré bèlè, chantant et dansant pour l'amour du bèlè, ne demandant en retour que respect et reconnaissance pour cette culture.
Ti Émile est aussi celui qui, fervent défenseur de la tradition, pressentait que les temps changeaient et que le bèlè devait tenir compte des évolutions de la société martiniquaise. On lui doit l'émergence du tournoi, forme moderne d'existence du danmyé. On lui doit aussi la création d'une forme renouvelée du kannigwé et du bénézwèl. On lui doit la création sinon l'animation des premières écoles de danse et de musique bèlè au centre culturel Jean-Marie Serreau de Dillon au début des années 1970 et au début des années 1980.
Enfin, Ti Émile est l'homme qui, avec ses limites, donnait avant toute chose l'image de la dignité et du respect de l’homme, d’une fierté d'être nègre et martiniquais. Son approche du bèlè était celle d'un "mannyè viv", d'une sorte de lien entre les nègres, et entre les être humains en général, lien porteur à la fois de notre souffrance historique et de notre capacité à rester debout.
De cette époque date les disques : Ti Émile et son groupe folklorique de Ste Marie of Martinique (accompagné par Féfé MAROLANY et Michet MARCELLIN) - Ti Émile et son groupe folklorique (accompagné par Félix CASERUS) - Ti Émile 25 ANS DE BEL AIR (accompagné par Marcel JUPITER) - Anthologie de la musique antillaise/Les rythmes/production du CMAC Vol 2 - Et aussi une participation au disque de Ronald RUBINEL, « Ethnicolor » en 1991.
Fait en juillet 2010, à partir du texte figurant à la Maison du bèlè, des données du grand livre des musiciens créoles de Sully Cally, de l’intervention AM4 du 9 0ctobre 1999 pour la manifestation « Woulo ba milo » à Paris.
Document réalisé en collaboration avec la Maison du bèlè, à l’occasion de la swaré bèlè centrale de 2010 de Marie-Victoire PERSANI,
en hommage aux « Gran Ansien » décédés